Pont du Gard et Gardon

Le Gardon, ce cours d’eau méditerranéen, affluent droit du Rhône est alimenté par un bassin qui occupe le tiers du département du Gard. Il prend sa source à Saint-Martin-de-Lansuscle, en Lozère, à 1000 m d’altitude. Sur la première moitié de son parcours, il dévale les Cévennes jusqu’à la plaine en amont du village de Ners, à 90 m d’altitude. A Ners, à mi-parcours, il reçoit le Gardon d’Anduze, le dernier de ses principaux affluents. Il entre alors dans la seconde partie de son cours ; il y perdra une partie de ses eaux à Boucoiran, alors qu’il circule au-dessus de blocs calcaires de la garrigue. Une certaine quantité alimentera les nappes phréatiques de la Gardonnenque et des gorges, l’autre  réapparaîtra seulement dans ses gorges,  à partir de Dions jusqu’à Collias et même jusqu’au pont du Gard. Il confluera avec le Rhône, à Comps, à moins de 10 m d’altitude, à quelques kilomètres en amont de Beaucaire et de Tarascon.

Les gorges du Gardon – Sur une trentaine de kilomètres, entre Dions et le pont du Gard, le Gardon circule dans des gorges profondes qu’il creuse depuis relativement peu de temps à l’échelle géologique, 4 ou 5 millions d’années, dans un substrat calcaire urgonien âgé de 140 à 150 millions d’années, au rythme d’un centimètre tous les 300 ans en moyenne ! La formation de ces gorges profondes par endroits de 150 à 180 mètres pose problème : pourquoi la rivière a préféré creuser cette saignée titanesque plutôt que contourner le massif, c’eut été si facile ? A cette question, André Bonnet, Jacques Larmat1 et Guilhem Fabre et Jean Pey2l’expliquent en s’appuyant sur la théorie de l’érosion régressive, selon laquelle la rivière creuse son lit en reculant, comme le couteau du boucher creuse un sillon dans la viande ; phénomène courant, dont les chutes du Niagara.

Les gardonnades – ou les crues du Gardon – Soumis aux grands écarts de température, à la persistance de la sécheresse l’été, le sol durcit, devient imperméable, le ruissellement l’emporte sur l’infiltration. Outre cela, la rivière reçoit les eaux d’un vaste bassin de 2000 km², ce qui explique brièvement le mécanisme des crues du Gardon et les débordements. Le même phénomène se passe avec les vidourlades du Vidourle.

Cliché : Claude Larnac- Académie Pont du Gard

Sept. 2002- Cliché : Claude Larnac- Académie Pont du Gard

Les crues sont classées selon leur importance, les crues courantes dites décennales de moins de 5 mètres au pont du Gard, plus exceptionnelles qu’on qualifie de centennales lesquelles peuvent revenir plusieurs fois par siècle, sans périodicité : 1900, 1907, 1914, 1945, 1951, 1958, 2002 pour les dernières.

Formule empirique de la Balouzière Il s’agit d’une formule empirique que nous avons établie à partir de résultats publiés dans la thèse d’Alfred Chabaud (L’Uzège, 1961) qui permet d’estimer, au pont du Gard, la vitesse d’une crue en fonction de la hauteur de l’eau, en amont du monument. 

Les abris sous roche – Les gorges se creusent lentement dans le calcaire dur de la garrigue3. En s’enfonçant, elles donnent naissance à des baumes (grottes) ou à des avens dont le plafond s’effondre parfois (Les Espélugues, à Dions). Quelques-unes de ces baumes sont ornées, dans leur couloirs les plus profonds, de dessins colorés avec des terres naturelles, du charbon de bois, des éléments minéraux ou tout simplement avec de la glaise répartie à la main. Les dessins digités de Baume Latrone, vieux de 30 000 ans, découverts au début du XXe siècle, sont maintenant bien connus et protégés4.
Gorges du Gardon 005Dans la garrigue on chassait, dans la rivière on pêchait et l’on cherchait de l’or. On y chasse toujours, on y pêche et l’on cherche toujours de l’or, comme dans la rivière Hérault (son nom l’indique) issue des Cévennes.

Ces gorges magnifiquement conservées et sauvées de quelques projets fous, par un personnage exceptionnel5, président dans les années 1990 de la SPN du Gard, la Société de Protection de la Nature, sont désormais classées et demeurent un joyau naturel de notre région.
Pour profiter de ce paysage, il faut se rendre à Russan, en été, lorsque le Gardon est à sec et que la circulation dans le lit asséché est autorisée. Marcher au fond des gorges, sur 12 km entièrement recouvertes de galets, de Russan au pont Saint Nicolas, ou bien descendre le Gardon en canoé à partir de Collias jusqu’au au pont du Gard font partie des souvenirs inoubliables.

Le Gardon et les galets. Il est permis de considérer les galets comme un des facteurs les plus agressifs que la nature utilise contre le pont du Gard. Les amoncellements de galets que la rivière dépose dans les gorges, représentent un Gorges du Gardon 009danger potentiel permanent et considérable en amont du pont du Gard. Les Romains en ont certainement tenu compte dans la construction des arches du monument, au point d’en réduire la larguer de leur assise au minimum, à la limite de leur stabilité. Galets que des entreprises locales ont exploités durant des décennies, tout le long du Gardon, en amont du pont du Gard, au pont submersible de Dions, comme en aval, à la Couasse.   

Désormais, on pourrait parler du Gardon et du tourisme, du sport, de l’escalade, de la spéléologie, mais nous sortirions de la rubrique histoire.

Pour en savoir plus :

André Bonnet et Jacques Larmat, Géologie du Gard, Académie de Nîmes
Guilhel Fabre et Jean Pey, Le Gardon et ses gorges, Presses du Languedoc, 1997
Claude Larnac, Racontez-moi le pont du Gard, Actes-Sud, 2010

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  1.  Introduction à la géologie du Gard, Académie de Nîmes []
  2. Le Gardon et ses gorges, Presses du Languedoc, 1997 []
  3. calcaire urgonien formé au fond des mers de l’ère secondaire, il y a environ 140 millions d’années -, du nom d’Orgon localité située à l’extrême est des Alpilles []
  4. l’entrée de la grotte est désormais condamnée et les décorations seront très prochainement reproduites sur DVD []
  5. Marcel Méric []
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